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Le saviez-vous ? Camille Blanc, l’architecte discret de la paix assassiné à Évian

Le saviez-vous ? Camille Blanc, l’architecte discret de la paix assassiné à Évian
Le saviez-vous ? Camille Blanc, l’architecte discret de la paix franco-algérienne assassiné à Évian

Élu en mai 1945 à la tête d’Évian‑les‑Bains, Camille Blanc incarne une figure marquante de la vie politique locale et nationale.

Né le 26 février 1911 à Thonon‑les‑Bains, ce résistant devenu socialiste sous l’étiquette SFIO a multiplié les succès électoraux : réélu en 1947, 1953 et 1959, il demeure à la tête de la commune jusqu’à sa mort tragique en 1961.

Surnommé “l’homme des congrès”, il fait d’Évian un pôle d’attractivité en misant sur trois leviers : la modernisation urbaine, le développement sanitaire et une diplomatie locale active. Son héritage en santé se concrétise par la construction de l’hôpital municipal, aujourd’hui Centre MGEN Camille-Blanc. En 1953, il inaugure le Palais des festivités, futur palais des congrès, symbole de la renaissance culturelle de la station. Il promeut aussi les premiers logements sociaux, rénove les quais, modernise les réseaux d’eau et d’électricité, et lance l’éclairage public, la réfection de la mairie et la construction du téléphérique des Mémises, en collaboration avec la voisine Thonon.

Militant fort d’un pacifisme enraciné, Camille Blanc assume son engagement dans la Résistance dès 1939. Il est décoré de la Croix de guerre 1939‑1945, de la Médaille de la Résistance, puis nommé Chevalier de la Légion d’honneur et Officier de l’ordre du Mérite touristique.

En 1960, fidèle à ses convictions, il propose Évian comme ville hôte des négociations entre délégations françaises et algériennes — un geste symbolique fort dans un climat national tendu.

Et malgré les menaces, Camille Blanc refuse toute protection policière.

Dans la nuit du 30 au 31 mars 1961, à 2h35, la ville est frappée par un attentat : deux charges en plastique explosent devant l'hôtel Beau-Rivage, le domicile du maire — l’une sous sa voiture, l’autre devant sa fenêtre. Le plan semble parfait, la première détonation a réveillé Camille Blanc et l'a poussé à se saisir du téléphone pour appeler les secours. Téléphone qui était proche de la fenêtre, où la seconde explosion le blesse mortellement.

L’attentat est rapidement revendiqué par l’Organisation armée secrète (OAS). Les enquêteurs identifient comme commanditaire un certain Paul Bianchi (Jeune Nation) et l’exécutant Pierre Fenoglio, arrivé d’Algérie. Ce dernier avait été aidé par un employé du Trésor à Evian.

Fenoglio a nié avoir voulu tuer Camille Blanc, affirmant avoir voulu lui "faire peur". D'ailleurs, il devait initialement faire sauter un embarcadère dans le port où étaient attendus les émissaires du FLN, mais une patrouille de police lui avait fait changer de cible.

Les huit complices de l'exécutant sont arrêtés en 1966 et jugés, avant une amnistie globale prononcée peu après par le Général de Gaulle.

Cet assassinat n’a cependant pas stoppé la dynamique des Accords d’Évian. Malgré le drame, les pourparlers s’ouvrent le 20 mai 1961 et aboutissent, le 18 mars 1962, à un cessez‑le‑feu historique puis à l’indépendance de l’Algérie.

Pour Évian, sa ville-labour, l’homme reste un symbole de paix. Plusieurs années après, ses proches soulignent sa simplicité, son sens de l’engagement et son sens aigu du devoir.

Camille Blanc a été la première victime en métropole du terrorisme lié à la guerre d’Algérie. Pourtant, ce sont sa ténacité et sa vision d’un Évian tourné vers la paix qui prévaut aujourd’hui dans la mémoire collective. Un vestige de son ambition reste visible dans les rues rénovées, les bâtiments publics et le visage conciliant d’une ville changée. Évian conserve le souvenir de son maire, non seulement en tant que bâtisseur municipal, mais surtout comme messager de paix — parti trop tôt, mais dont l’héritage continue de guider la cité thermale vers l’harmonie et le dialogue.